La nonna (en italien), LeonildaProvenzal, née à Livourne (ou à Pise) le 19 novembre 1866, décédée paisiblement à Tunis, au Passage Romano le 15 décembre 1940. Deux de ses soeurs ont vécu à Tunis, zia Virginia et zia Carolina, des destins tout à fait différents, l'une grande bourgeoise, l'autre plus modeste, je me souviens encore de sa voix douce, de ses manières très peu affirmées, à côté de son mari zio Benjamin, énorme, une extraordinaire voix grasse ; il avait combattu aux Dardanelles ...

Des frères de la nonna je ne sais pas grand'chose, sauf que l'un, en Italie, s'il n'avait pas été ouvertement fasciste, n'avait pas été hostile au régime, histoire de conserver son poste de professeur ... Il y avait un zio Carlo, libre penseur, enterré à Tunis dans le carré des libres penseurs ... on ne mélange pas les gens, les genres ...

Et les frères et soeurs du nonno, les Nataf ... zio Victor, zia Tita, zia Mimah ... elles étaient habillées "selon la tradition", ample serouel blanc, foulard noué sur les cheveux, on voit des photos de ces femmes de Tunis dans des bouquins et sans doute sur le net ... On allait leur rendre visite mais je ne me souviens d'aucun geste, elles devaient être très vieilles à nos yeux ... Zio Victor était marié à une extraordinaire zia Messiada ("Fortunée" elle préférait qu'on le dise à la française), cheveux d'un noir de jais, moderne, énergique et entreprenante, qui, lorsqu'elle venait, elle, en visite, ne décollait plus ... et ma mère qui n'arrivait pas à retourner à ses propres occupations mais n'osait pas lui signifier qu'elle s'éternisait ... Je me souviens de mon père lui disant, "mais tu n'as qu'à dire que tu as du travail ... " pas si facile ...

Mais comment ne pas évoquer l'activité de mohel qu'exerçait Angelo Nataf ... et qui lui a valu de passer à la postérité , au début par des cartes postales dont une datée de 1921 ... Il devait sa notoriété disait-on, son talent mais à sa générosité, au fait qu'il était proche des gens ...