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quelques souvenirs des moments qui ont suivi la Libération,

 

soit des deux mois de mai et juin, temps de repos avant le débarquement en Sicile ...

 

 

   Lorsque les américains et les anglais nous ont libérés en mai 43, nous avons connu des tas de gars ils venaient à la ferme, ma mère parlait l'anglais et tout le monde était si heureux de la libération, très vite les habitués, il y avait un gars qu'on appelait Greek - les américains donnaient des surnoms comme ça à leurs GI's, d'après leur origine, celle de leurs parents. - Greek avait dit de nous "it's a musical home" ... Frank le hongrois, un grand, beau et très gai, qui disait "I'll shine in Budapest", Smithy l'irlandais petit et vif, "Mac" d'origine indienne (les indiens d'Amérique) tué peu de temps après en avion ... je me souviens de son beau regard brun ...

    Les anglais : avant tout, Bob (l'écossais de Glasgow, premier amour, correspondance pendant assez longtemps après leur départ) ; c'est le seul nom dont je me souvienne, tous les autres ... un pasteur sentencieux, un grand (je devrais pouvoir retrouver son surnom, pas trop flatteur ... finfrog ... ) qui s'endormait dans le fauteuil et respirait bouche ouverte, et le Docteur ah oui, qui apprenait le français et demandait qu'on corrige ses fautes, je me souviens d'une ordonnance qu'il avait rédigée "secouez en avant de prendre" (un sirop) ... le Docteur, gradé, avait une casquette, tous les autres des calots ...

Mais, j'ai des photos, je vais essayer de les scanner ...

    et les français de la 8e Armée ! l'émotion, pour eux, pour nous !!! il y en avait un, si grand si beau, qui chantait le Temps des Cerises ... ma mère au piano, quelle joie mais vraiment l'émotion alors, je m'en souviens toujours, bien que je l'aie racontée n fois ... et je crois bien que toutes les fois que je l'entends, c'est ce moment qui revient ... très fort ... l'image de ce grand gars beau et bronzé, chantant de tout son coeur, cette voix magnifique, et au fond la première voix non teintée de "collabotisme, collabisme, collaracisme" ... c'est peut-être ça la vérité profonde de cet instant unique ... je ne crois pas que nous ayions revu de français libres, la 8e armée n'a pas séjourné ... c'était le Premier Jour, et toute la suite ce sont les américains, et pourtant oui, quelques anglais aussi, alors je ne sais pas pourquoi les français de la 8e armée on les a vus une seule fois ...

 

  et (donc) parmi ces américains, un philippin, un géant qui justement avait un nez comme ça ... c'est drôle de le retrouver qq 60 ans plus tard et de, en somme de le reconnaître ... [pas lui mais son nez ! chez PB, le kiné amateur de plongée] ... j'en parle parce que ce philippin n'a été qu'une apparition, il n'a pas fréquenté la maison, donc insignifiant sur le moment et toc, comme un cliché qui ressort ce type de visage un peu les yeux bridés ...

 

   De la joie de Tunis même, la capitale, la ville, je n'ai rien vu rien su sur le moment, puisque nous n'y étions pas et c'est en regardant Histoire parallèle, de Marc Ferro que j'ai pu participer rétrospectivement à l'enthousiasme de la Libération